Chateau-Bien-Assis

Les Amis de Montluçon

Société d'Histoire et d'Archéologie

Les Amis de Montluçon

Le château de Bien-Assis

Le château est un manoir caractéristique du XVe siècle ; il est de plan rectangulaire, avec une tour carrée contenant un escalier à vis, faisant saillie au centre de la façade.
Bâti sur une cave voûtée en berceau (où se trouve une source), il comporte à chacun des deux premiers niveaux deux pièces d’environ 7,60 m de long sur 6,80 m de large. L’escalier droit menant à la cave, qui à l’origine était sans doute à l’extérieur, a été inclus ultérieurement dans un appentis ajouté du coté nord, ce qui a permis d’adjoindre au rez-de-chaussée une petite salle (1,80 m x 2,60 m) voûtée en berceau et appelée trésor, aujourd’hui occupée par un local technique et les toilettes, et à l’étage une salle longue et étroite également voûtée en berceau et appelée chapelle.
L’escalier à vis donne accès, au second étage, à une vaste salle, éclairée par six petites fenêtres (dont une est murée). Un escalier en bois permet d’atteindre les combles, également accessibles par la petite tourelle. Celle-ci prend naissance dans l’angle sud-ouest de la tour à partir du deuxième étage, et donne accès à la salle de la tour, située au-dessus de l’escalier à vis et voûtée d’ogives (les nervures retombent jusqu’au plancher, sans chapiteaux). Elle mène ensuite à la terrasse de la tour, ceinte de merlons et couverte d’un toit à quatre pans qui est probablement postérieur à la construction. Cette terrasse domine le faîte du toit du château, permettant une vue circulaire.
Le château de Bien-Assis a heureusement conservé presque intactes ses dispositions d’origine. La salle de gauche au premier étage a cependant été divisée, à une époque indéterminée, en deux salles. Cette séparation a entraîné le percement d’une fenêtre côté ouest. La façade ouest porte en son milieu les traces (trois corbeaux un peu au-dessus du sol, chevêtre dans la charpente, différence dans la constitution de la maçonnerie) d’une construction en encorbellement (figurée sur le plan cadastral de 1811) qui a pu abriter des latrines.
Les encadrements des portes et des fenêtres (à croisillons) sont sculptés dans un grès local d’une chaude couleur ocre irrégulière.
À l’intérieur, on trouve cinq cheminées monumentales, dont deux, celles du rez-de-chaussée, sont intactes.
Au premier étage, si la cheminée située dans la bibliothèque est également d’origine, celle qu’on peut voir dans la salle de droite (salle historique) a remplacé, à l’occasion de la campagne de restauration de 1992, la cheminée primitive qu’un ancien propriétaire avait vendue et qui se trouverait maintenant au château de Bourbon-Busset.
Enfin, la salle gothique de la tour est munie d’une cheminée qui avait été en partie détruite lors des combats de la Libération de Montluçon et qui a été restaurée en 1993.
Les planchers sont d’origine, à l’exception de celui de la salle d’exposition du premier étage, et de celui de la grande salle du deuxième étage. De 2010 à 2016, une campagne de restauration a mis à jour ces peintures.
Notons enfin que, avant la création du centre commercial, le château comportait des communs, comme on peut le voir sur les documents, dessins ou photographies des années 1900 et 1960.
Le château n’a jamais été une forteresse, mais plutôt une maison forte. Les quelques éléments de fortification visibles (merlons de la tour, meurtrières) paraissent plus décoratifs que fonctionnels, encore qu’ils aient sans doute pu être dissuasifs en des temps troublés, vis-à-vis des brigands et des voleurs. Les grilles du rez-de-chaussée, récemment rétablies, jouent ce même rôle.
Le plus ancien document connu où il est question d’un « seigneur de Bien-Assis » est un acte du 9 avril 1481 concernant l’achat d’un fief par Colas de Péret, « bourgeois de Montluçon et seigneur de Bien-Assis».
Le 17 du même mois, de Péret règle le droit de franc-fief relatif à l’acquisition précédente, ce qui confirme qu’il n’est pas noble.
Le 10 mai 1493, il est encore cité comme « seigneur de Bien-Assis » parmi les notables qui sont réunis pour la rédaction des anciennes coutumes du Bourbonnais.
Nous savons d’autre part par le terrier ducal qu’il était propriétaire au 28 janvier 1455 de nombreux biens, dont deux sétérées de terre au terroir de Bien-Assis.
Comme le style du château permet de le dater du XVe siècle, et probablement de sa seconde moitié, on peut supposer que c’est Colas de Péret (aussi nommé Nicolas du Peyret ou Dupeyret) qui l’a fait construire.
Nicolas Dupeyret est un officier ducal : en 1485, il est nommé « maître de la chambre aux deniers » du duc Jean II, aux appointements annuels de 400 livres – somme considérable. En 1486, il est secrétaire du duc, puis il est nommé son « trésorier général de toutes les finances ».
En 1496, il est décédé, puisqu’un acte est passé par sa veuve le 2 août, pour un échange avec le duc (qui ne concerne pas Bien-Assis).
Nous ne savons pas quand, ni comment, Bien-Assis est sorti de la famille Dupeyret, mais, au 12 février 1541, le terrier de Saint-Pierre mentionne que maistres Gilbert et Étienne Chesauvert reconnaissent une redevance comme « detempteurs du lieu de Bien-Assis, soient maisons, granges…». Il s’agit en fait d’un prêt à 5 % fait par les religieux de Saint-Pierre, gagé sur la propriété de Bien-Assis. La redevance est en effet rachetable sous dix ans. L’emprunt a d’ailleurs été prorogé et finalement remboursé le 5 mai 1562, comme l’indique une mention marginale, par « damoiselle Marguerite Boudon, femme de Maître Gilbert Chasauvert, sieur de Bien-Assis », pour une somme de 77 livres 10 sols.
Notons que la famille Chasauvert (ou Chesauvert) est connue de nous depuis 1467 : Guillaume Chesauvert, substitut du procureur du duc de Bourbon en la châtellenie de Montluçon, puis Jacques, qui exerce la même fonction. Il participe avec Philippe de Fourest à la confection du registre des tailles personnelles en 1479-1481 et il déclare des propriétés au terrier ducal en 1496.
Nous trouvons ensuite la famille Mercier, sans non plus savoir quand ni comment Bien-Assis est passé des Chasauvert aux Mercier.
De Jean Mercier, bourgeois de Montluçon, clerc, nous ne savons rien, si ce n’est qu’il épousa Marguerite Bachon, qu’il eut au moins deux fils, dont un prénommé Nicolas, et qu’il reconnut une maison au terrier du duc le 18 janvier 1497. Le petit-fils de Nicolas, Pierre, épouse Radegonde de La Roche-Aymon. Il décède avant 1598.
Alphonse Guénard suppose que c’est lui qui a acheté Bien-Assis à Gilbert Chasauvert. Son fils aîné, Claude, est en effet dit « seigneur de Bien-Assis et du Peschin ». Il épouse, vers 1580, Bénigne de La Maisonneuve et décède avant 1635. Son fils Jean, né vers 1580, épouse, vers 1608, Jeanne Banezon. Il est dit seigneur de Bien-Assis ; il décède avant 1637 et laisse un fils, Claude, qui épouse vers 1646 Jacqueline Descouts. Ils ont plusieurs enfants : l’aîné, Jean-Baptiste, est né le 29 novembre 1647. Il épouse en 1671 Marie-Madeleine Perrine. Il hérite du titre de Bien-Assis et décède le 1er avril 1689. Seule une fille parmi ses neuf enfants assure la descendance, en épousant le 30 avril 1699 Pierre Alamargot.
Son frère cadet, Antoine, devient seigneur de Bien-Assis (« en partie » selon des Gozis) ; né le 6 novembre 1648, décédé en 1708, il est consul de Montluçon en 1689. De Marie-Madeleine Deschamps, il eut treize enfants, dont aucun ne perpétua le nom. Seule sa fille Marie-Madeleine Mercier de Bien-Assis, née le 24 avril 1694, se marie : elle épouse Jean-Baptiste Tardé, seigneur de la Vault, le 18 novembre 1729. De ces Tardé, nous connaissons notamment les armoiries.
À la mort de Marie-Madeleine Mercier (10 janvier 1762), la propriété de Bien-Assis  revient à ce dernier, substitut du procureur du roi en l’élection de Montluçon, en exécution d’une donation mutuelle de tous leurs biens au dernier vivant. Leurs enfants ne leur ayant pas survécu, le manoir passe ensuite à Claude Tardé de La Vaux, frère de Jean-Baptiste, par donation entre vifs du 2 mars 1753, sous réserve de l’usufruit en viager ; le donataire décède avant le donateur le 27 septembre 1760. Peu après le décès de son beau-frère (20 janvier 1768), la seconde épouse de Claude Tardé, Marie-Anne Perrot des Modières, fait dresser un inventaire des biens du défunt, le 15 février 1768, afin de garantir les droits de ses enfants mineurs à cet héritage. Cet inventaire après décès donne un état très précis de l’ameublement du manoir à cette date, du cheptel du domaine et des titres d’acquisition de vignes et terres, du début du XVIIIe siècle à la fin du règne de Louis XV.
Le manoir appartient donc aux Tardé de La Vaux jusqu’à la Révolution. Il passe à la suite d’un mariage aux Fourneau de Crébert, après l’union de Madeleine Tardé de Mousseaux, fille de Claude et de Marie-Anne Perrot des Modières, avec Gilbert Fourneau, sieur des Ferrières, lieutenant aux traites foraines, le 31 mai 1774. La fille de ces derniers, Madeleine-Bathilde Fourneau de Crébert, apporte le manoir en dot aux Villatte de Peufeilhoux, lors de son union avec Jean-Antoine Villatte de Peufeilhoux, futur maire de Néris, le 18 brumaire an V (8 novembre 1796).
On peut mentionner un projet détaillé de « modernisation » du château élaboré au XVIIIe siècle probablement pour le compte d’un Alamargot de Villiers, et qui nous est parvenu. Heureusement, ce projet qui aurait dénaturé le château n’a pas été exécuté.
Nous savons aussi que le château ne figure pas parmi les biens nationaux vendus pendant la Révolution.
En remontant les actes notariés, on retrouve en 1842 le domaine de Bien-Assis aux mains de Magdeleine-Louise de Peufeilhoux, épouse de Louis-Désiré Lecointe. Il passe par mariage dans la famille Alamargot de Villiers, puis dans la famille de La Saigne de Saint-Georges et enfin à Mme de Sarret, qui le vend en 1953 à MM. Jean et Richard de Montaignac.
Ceux-ci sont expropriés au profit de la ville de Montluçon (1964), qui cède ensuite le domaine à la Société d’équipement du Bourbonnais. C’est à cette dernière que les Amis de Montluçon achètent le château en 1970.
Au moment de cette acquisition les bâtiments étaient en très mauvais état. Ils avaient longtemps servi à une exploitation agricole ; des arbustes poussaient sur le toit de la chapelle !
Plusieurs campagnes de restauration ont été alors menées, certaines nécessitant des travaux importants effectués par des entreprises spécialisées. D’autres, de moindre envergure mais de longue durée, ont été réalisées par des membres bénévoles de l’association.