À la veille de la deuxième guerre mondiale, le bassin montluçonnais constitue le 1er centre industriel de l’Allier en concentrant plus de 40 % de l’activité industrielle et commerciale. Entre des usines centenaires comme Saint-Jacques ou Saint-Gobain et des usines récentes comme Dunlop ou Sagem, trois grandes activités dominent : la sidérurgie, la chimie, et la mécanique. Avec 4 000 salariés en 1939, Dunlop est devenu le 1er employeur industriel dépassant Saint-Jacques et la Sagem connaît une montée en puissance rapide. Plusieurs de ces entreprises travaillant pour la défense, elles se retrouvent directement impliquées dans la guerre. Même si on a pris soin de maintenir en usine des affectés spéciaux, nombre d’ouvriers et d’employés se retrouvent mobilisés en septembre 1939, ce qui oblige à repenser les modes de production, à un moment où l’État demande un effort accru. La guerre est aussi à l’origine de l’installation à Montluçon de l’usine Landis et Gyr.
Après la défaite de mai-juin 1940, Montluçon se retrouve en zone libre mais les industries voient une partie de leur production livrée à l’Allemagne, dans le cadre de la convention d’armistice. Aux difficultés d’approvisionnement en matières premières (Dunlop), s’ajoute la perte des commandes de l’État : à la Sagem, on va devoir mettre l’accent sur les productions civiles pour compenser la perte des marchés militaires.
Les ouvriers deviennent un enjeu dans le cadre de la Révolution Nationale que compte instaurer le régime de Vichy. Dès l’automne 1940, la répression antisyndicale s’abat et les syndicats sont interdits. Ils sont remplacés par un système corporatiste qui entend promouvoir la concorde entre ouvriers et patrons. C’est cette Charte du travail que Pétain vient promouvoir à Montluçon et à Commentry le 1er mai 1941.
En même temps, pour répondre aux demandes de main d’œuvre de l’Allemagne, on incite d’abord au volontariat. L’échec de la relève (juin 1942) malgré la propagande déployée pour séduire les ouvriers, conduit à de nouvelles étapes : la réquisition (septembre 1942) qui débouche sur le Service du travail obligatoire (février 1943). Ces mesures sont à l’origine de la grande manifestation du 6 janvier 1943.
À partir de novembre 1942, après l’invasion de la zone libre, l’Allemagne délègue des représentants auprès de la direction des usines montluçonnaises pour surveiller gestion et productions. Si la plupart des chefs d’entreprises sont satisfaits de la nouvelle politique sociale, ils ne s’engagent pas dans une collaboration active, à l’exception du patron de l’usine des Fers creux.
Dans le même temps, la résistance s’organise dans les usines : au-delà de la collecte de renseignements et de la distribution de tracts, sabotages et attentats permettent de ralentir les productions à destination de l’Allemagne. Arrestations, condamnations et déportations s’abattent sur les auteurs de ces actes de résistance.
C’est pour détruire une usine dont une part importante des pneus équipe les avions de la Luftwaffe et des camions de la Wehrmacht, que les Alliés décident du bombardement de l’usine Dunlop, dans la nuit du 15 au 16 septembre 1943. 375 avions et 2 800 hommes d’équipage sont mobilisés pour larguer 1 000 tonnes de bombes sur le site. L’opération qui est une réussite, avec une usine détruite à plus de 80%, se solde aussi par 57 victimes civiles, 150 blessés et elle a fait 850 sans abris. Des faits que la propagande ne manquera pas d’exploiter.
Après la libération de Montluçon, les directions et les personnels des usines sont touchés par l’Épuration, le Comité départemental de Libération installant à leur tête des éphémères Comités de gestion. La guerre n’étant pas terminée pour autant, l’effort de guerre va se poursuivre jusqu’en mai 1945, tandis qu’à l’usine Dunlop on s’active à la reconstruction.